Dernière maj le 17/01/2005

TRANSPORTS DE MARCHANDISES.
Que nous réserve l' avenir ?


LE TRANSPORT ROUTIER
Transports routiers : pas d'amélioration en vue
Comment limiter le transport routier ?

QUE FAIT LA SNCF?
La SNCF cherche d'abord sa rentabilité : des exemples édifiants
Le fret ferroviaire
Le ferroutage ou transport combiné

LE TRANSPORT FLUVIAL

 

LE TRANSPORT ROUTIER

Transports routiers : pas d'amélioration en vue

Le trafic routier, dans son ensemble, est un des secteurs préoccupants pour les émissions de gaz à effet de serre et il est clair au vu de son développement rapide que le progrès technologique ne suffira pas pour réduire son impact sur l'environnement.

Le graphique ci-dessous montre très clairement la part considérable prise, en France, par le transport routier dans les émissions de CO2 générées par le secteur des transports.

Source : Ministère des transports. CITEPA /série Coralie/ format SECTEN

Si rien n'est entrepris pour y remédier, cette situation va rapidement s'aggraver car, selon les perspectives du Livre Blanc de la Commission européenne, "l'Europe des 25 devrait générer 3 % de croissance économique, se traduisant par un doublement des trafics à l'horizon 2020". La part de la route représente déjà quelque 85 % du fret transitant par notre territoire (85% en tonnage, près de 90% en valeur), elle se situe entre 70 et 80 % dans les principaux pays européens.

Bien qu'une mission d'information demandée par le sénat en juillet 2002 signalait "qu'un recours supplémentaire à la route pour absorber le surplus de fret prévisible dans les dix et vingt prochaines années, ne pourra conduire qu'à l'asphyxie de ce mode," le Ministre des transports, Gilles de Robien se veut rassurant et se contente de discours lénifiants sur la nécessité de promouvoir des alternatives performantes au transport routier et de rééquilibrer le trafic en faveur du transport ferroviaire et du transport fluvial, qui disposent d’avantages incontestables en terme de sécurité et de respect de l'environnement.

Il n'est, pourtant, pas facile de le croire sur parole alors que le nombre de poids lourds continue de progresser inexorablement sur les routes et autoroutes de France, et que curieusement, le plan climat présenté durant l'été 2004 par Serge Lepeltier, Ministre de l'Ecologie et du Développement durable, ne comporte pas une seule ligne sur le transport routier.

La création d'un siteEnergeco, lancé il y a quelques mois, grâce au financement et sur suggestion de l'ADEME, pour inciter les transporteurs routiers, assez peu réceptifs aux préoccupations environnementales, à réduire leur consommation de carburant et les sensibiliser à une conduite plus rationnelle, ne peut masquer l'indigence de l'action gouvernementale en matière de transports de marchandises dont l'idée maîtresse semble être "qu'il faut donner du temps au temps".

Et pourtant ça chauffe !

Un court moment, La taxation des camions a été envisagée, mais l'idée a bien vite été enterrée par la création d'une commission sur le sujet.

L'accord signé sous le gouvernement précédent par la SNCF et la Fédération nationale du transport routier (FNTS), dont les représentants eux-mêmes commencent à admettre la nécessité de solutions alternatives, prévoyant de tripler en 10 ans le trafic combiné rail-route est tombé en désuétude faute, paraît-il, d'un financement suffisant des infrastructures nécessaires. Un audit et deux rapports ont été demandés sur le sujet. Alors roulez camions !

 

Photo LCPC Photo Novatrans

Comment limiter le transport routier ?

Certes, il faut un réel courage politique pour affronter le lobby routier dont le pouvoir de nuisance est considérable. Il peut et l'a démontré à plusieurs reprises dans le passé bloquer toute l'économie du pays avec un nombre limité de camions.

Certes le problème n'est pas facile à résoudre car la France, pays de transit, se doit, dans un secteur livré à une concurrence féroce, de protéger l'équilibre économique de ses entreprises de transport.

Certes le transport routier présente des avantages indiscutables grâce à :

Il représente actuellement une réponse adaptée à la gestion flexible et en flux tendu adoptée par les entreprises industrielles et commerciales (aujourd'hui les stocks sont sur la route) et à l'attente des consommateurs habitués a recevoir leurs achats rapidement.

Malgré toutes ces considérations, la lutte contre le réchauffement climatique doit constituer, désormais, la priorité des priorités. Il est impératif de dépasser le stade des discours de circonstances et de laisser jouer la concurrence. Il est plus que temps d'adopter une politique volontariste et des mesures contraignantes en matière de transport.

Il faudrait instituer une "taxe carbone" ou "redevance effet de serre" sur les camions, il n'y a pas d'autre issue possible et le plus tôt sera le mieux.

Il faudrait facturer le transport routier à son vrai coût, un camion use 10 fois plus une autoroute qu'une voiture et ne paie le péage que quatre fois plus. Un avant-projet de directive est en discussion pour imposer un système européen de péages pour les poids lourds. Si ce projet prend corps, il soulagerait n'en doutons pas, le gouvernement français. L'Allemagne vient de d'instaurer un péage autoroutier pour les poids lourds au 1er janvier 2005.

Il faudrait taxer le gas-oil au même titre que l'essence et, sans doute, adopter des mesures fiscales pour inciter les entreprises à passer de la route au rail ou au transport fluvial.

L'Union Européenne serait assurément la mieux placée pour définir une véritable politique européenne des transports. Elle pourrait participer activement au développement intermodal et agir notamment sur le problème du dumping social, auquel se livrent certains des nouveaux pays de l'Union, fragilisant économiquement beaucoup d'entreprises de transport.

Mais les contradictions entre l'interventionnisme dont il faudrait faire preuve à cette occasion et sa doctrine ultra libérale favorisant à l'extrême les mécanismes du marché et la libre concurrence sont assurément un frein à la mise en place d'une politique des transports cohérente au niveau européen.

 

Que fait la SNCF ?

La SNCF cherche d'abord sa rentabilité : des exemples édifiants

Aux informations régionales de FR3 Ouest du 15 novembre 2004, le patron d'une entreprise de cartonnerie qui avait fait le choix du rail pour l'expédition de ses marchandises nous expliquait que, à sa grande surprise, la SNCF venait de lui apprendre, sans négociations préalables, qu'elle rompait le contrat qui les liaient. Cette fabrique de cartons avait fait le choix du transport ferroviaire, voici plusieurs années, pour des raisons environnementales. Les travaux nécessaires pour permettre l'accès et le chargement des wagons dans l'usine (pose de rails et construction d'un quai) avaient été effectués.

Cette décision unilatérale de la SNCF laisse cet entrepreneur littéralement pantois. Indépendamment de la perte des investissements réalisés, il ne comprend pas que l'Etat, toujours patron de l'Entreprise Nationale et initiateur d'une campagne publicitaire pour inciter les automobilistes à limiter leur consommation de carburants, le contraint à lancer sur les routes un nombre important de camions supplémentaires. Ce moyen de transport qui lui est imposé l'arrange d'autant moins que son entreprise est directement concernée par le Plan National d'Allocations de Quotas (PNAQ) qui entre en vigueur le 1er janvier 2005 et qui oblige les industries grosses consommatrices d'énergie à limiter leurs émissions de CO2.

D'autres ruptures de contrat analogues se seraient déjà produites, le transport des eaux de source "Cristalline" aurait, semble-t-il connu la même mésaventure. D'autres gros clients de la SNCF notamment les eaux d'Evian (Danone) envisageraient de recourir davantage aux camions.

Quelques jours pus tard et toujours sur FR3 Ouest, le Maire de Carhaix (Finistère) nous indiquait que la SNCF venait de décider de supprimer tous les trains de marchandises dont le nombre de wagons était inférieur à vingt deux réduisant ainsi des deux tiers l'activité fret de sa gare. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres car la fermeture d'autres gares serait d'ores et déjà programmée dans le plan de redressement adopté par la SNCF.

L'Entreprise Nationale qui a su imposer aux pouvoirs publics successifs sa vision d'un transport de voyageurs ultra prioritaire, justifie ces abandons par le manque de rentabilité de sa branche fret dont les pertes plombent les comptes de l'entreprise. "Beaucoup de nos tarifs étaient nettement sous-évalués et nombre de marchés n'étaient pas pertinents." déclarait récemment au mensuel "Que choisir" le directeur commercial du fret SNCF. "Notre mission est de proposer un service de qualité, adapté et rentable. Pas de vider la route à tout prix."poursuivait-il.

Dans la même période, le Ministre des transports, Gilles de Robien nous annonçait avec satisfaction que la SNCF devrait avoir des résultats légèrement excédentaires en 2004. Si c'est au prix d'abandons de ce type il n'y a pas de quoi se réjouir.

Ces choix, source de gâchis et d'incohérences, montrent simplement l'incapacité du marché, auquel sont désormais soumis nos services publics, à répondre au défi, capital pour l'avenir de la planète, que représente le réchauffement climatique.

Le fret ferroviaire

Après avoir eu en charge la moitié du trafic de fret dans les années cinquante, le rail assure aujourd'hui globalement 20% du volume total en tonnes-km du transport des marchandises sur le territoire français. Il faut noter, toutefois, que cette part est supérieure à celle enregistrée dans la majorité des autres pays européens (8 % en moyenne européenne), ce qui n'est pas réjouissant.

Le trafic 2000 représentait 55,4 milliards de tonnes-km, celui de 2001 était de 50,4 (dont plus de 50% correspond au trafic international). A ce rythme, on peut douter que la cible visée par les schémas de services collectifs de transport de doubler le volume de trafic ferroviaire de fret d’ici 2010 (soit environ 100 milliards de t/km par an) puisse être atteinte.

Pourtant, le mode ferroviaire est, à l'évidence, un élément majeur du nécessaire rééquilibrage entre les différents modes de transport de marchandises. Il revient à l'Etat mais aussi à l'Union Européenne de soutenir les efforts entrepris par l'entreprise Réseau Ferré de France (issu de la branche de gestion du réseau de la SNCF), pour moderniser et adapter le réseau.

Le ferroutage ou transport combiné

Le trafic combiné rail-route est sans aucun doute la solution permettant de tirer parti de la façon la plus pertinente et la plus efficace des complémentarités du rail et de la route. Personne ne le conteste et pourtant le développement de ce type de transport se fait attendre.

Actuellement, le fret rail-route n'assure plus que 4 % du trafic total de fret. Bien qu'il soit plus particulièrement adapté aux distances supérieures à 500 km, il ne représente qu'à peine 10 % du trafic dans ce créneau.

Là encore, la SNCF montre peu d'enthousiasme pour monter en puissance, Il est vrai que les subventions versées pour aider le combiné qui étaient, selon "que choisir", de 90 millions d'euros en1996 sont tombées à 12 millions en 2004. Ceci explique cela.

Photo Novatrans Photo Novatrans

Le principe du ferroutage consiste à charger sur des trains :

Un train de "transport combiné" pouvant transporter jusqu’à 60 conteneurs ou remorques sur un seul et même convoi, il est intéressant de constater que la mise en service de 20 trains par jour et par sens permettrait, sur un axe donné, d’ôter de la route entre 1700 et 2400 camions. Des trains plus longs (certains convois de 1500 mètres de long sont aujourd'hui envisagés) pourraient doubler cette capacité.

Pour les "'autoroutes ferroviaires", il est prévu d'utiliser des rames indéformables de 750 mètres de long capables d’embarquer 35 camions de 40 tonnes. En fonction du trafic, les trains seraient composés de deux ou trois rames jumelées disposant chacune d'une motrice en tête et en queue. Pour 20 trains par sens et par jour, le trafic évité à la route serait alors de 1400 à 4200 camions suivant le nombre de rames constituant chaque train.

Pour l'instant ces méthodes de ferroutage ont été développées dans des régions montagneuses, comme en Suisse, ou pour franchir un obstacle incontournable, comme la Manche.

Mais les freins au développement du ferroutage sont encore nombreux :

Outre le projet de service d’autoroute ferroviaire Lyon/Turin à travers les Alpes, mentionné ci-dessus, qui comportera de 20 à 30 navettes par jour et dont la mise en place est programmée à l’horizon 2005/2006, un autre projet est en cours de montage. Il s'agit de la ligne dite "Magistrale ECO FRET", qui, grâce à un ensemble d’améliorations sur les infrastructures existantes et à des tronçons de lignes nouvelles ainsi qu’à des mesures d’optimisation de l’exploitation, vise à développer le trafic de transit sur le grand axe d’échange européen Benelux/Grande Bretagne/Allemagne à destination de l’Espagne et de l’Italie.

Le Transport Fluvial

Malgré une progression de 22 % du trafic fluvial entre 1997 et 2002 le transport par voie d'eau reste largement sous-exploité. Le fret fluvial ne représente, en dépit de son faible coût, que 3.5% du volume total du transport de marchandises. Il se situait à 6% en 1980.

Il présente pourtant des atouts en matière de sécurité, de fiabilité et de performances dans le domaine des économies d'énergie et de la préservation de l'environnement, et constitue donc un mode alternatif intéressant à la route. A titre comparatif, le projet de canal à " grand gabarit " Seine - Nord permettra des chargements pouvant aller jusqu'à 4400tonnes équivalent à 220camions ou 3 à 4 trains complets. A noter aussi que la consommation énergétique d'une péniche est 5 fois moindre que celle d'un camion, par tonne transportée.

Le transport fluvial est également extrêmement sur et devrait être choisi en priorité pour transporter toutes marchandises dangereuses ou polluantes.

Un recours croissant au transport fluvial, plus lent, suppose, cependant, un changement des habitudes de consommation, les entreprises devront à nouveau disposer de stock et les consommateurs patienter un peu pour recevoir leurs commandes. "Le tout, tout de suite" devra alors avoir vécu. Mais l'enjeu en vaut la chandelle.

Actuellement, le fret fluvial repose encore essentiellement sur le transport des céréales et des matériaux de construction (58% des trafics), la grande distribution représente seulement 2% du trafic total en région parisienne, mais une diversification des frets, à plus forte valeur ajoutée s’est amorcée ces dernières années comme en atteste le développement fort du secteur de la chimie lourde et celui du transport de conteneurs. Chargeurs et transporteurs y voient aujourd'hui un intérêt économique mais aussi une occasion de contribuer aux enjeux de développement durable. En Rhône-Alpes, par exemple, les trafics fluviaux conteneurisés ont quasiment doublé entre 2002 et 2003. La mise en place en 2005 d’un 2ème terminal à conteneur au port de Lyon et la possibilité prochaine d'y dédouaner les marchandises renforceront cette attractivité.

Photos : Port autonome de Paris

Mais le développement du trafic fluvial passe avant tout par une modernisation du réseau des voies navigables (50 % du réseau fluvial français est resté aux normes au XIXème siècle) et des infrastructures industrielles et portuaires afin d'améliorer les interfaces entre la voie d'eau et les autres modes de transport.

Le rapport de la mission d'information demandée par le sénat en juillet 2002 ne pouvait que constater " le caractère obsolète de l'actuel réseau fluvial français au regard, notamment, de sa connexion au réseau transeuropéen." En effet sur 18.000km de voies d'eau, la France possède 8.500km de voies navigables et seulement 1.700km au gabarit européen.

Il préconise donc que "la France se dote d'un réseau fluvial à grand gabarit relié au réseau européen, apportant ainsi une solution aux problèmes du " maillon manquant " dont la réalisation permettrait la connexion des bassins du Rhin, de la Seine, de la Moselle et de Rhône-Saône."

Il estime, en conséquence, "qu'il convient d'accélérer la réalisation du projet Seine-nord, c'est-à-dire la connexion du bassin de la Seine au réseau fluvial des pays de l'Europe du nord et de réaliser, ensuite, l'achèvement du maillage puisque restent en effet à relier, Seine-Moselle, Saône-Moselle et Saône-Rhin. Le projet de mise à grand gabarit de l'axe Saône-Rhin, abandonné en 1997, doit être réexaminé et redevenir une priorité dans le calendrier."

Un problème de hauteur de ponts se pose, notamment, sur cette liaison empêchant le passage des convois de conteneurs et la limitant aux trafics de pondéreux.

Voilà défini un programme ambitieux mais réaliste qui permettrait au réseau français, connecté au réseau européen, de constituer le point de passage entre l' Europe orientale et la Méditerranée.

Sa réalisation devrait contribuer à augmenter fortement la part du fret fluvial, à désengorger notre réseau routier et à réduire notablement les émissions de gaz à effet de serre. Il serait absurde de ne pas le réaliser.

Le hic de ce programme concerne son financement. Le coût total des travaux se situerait, selon la mission d'information du sénat, dans une fourchette de 15 à 23 milliards d'euros. La mission propose donc pour alléger la facture de l'étaler sur 25 à 30 ans.

En attendant, roulez camions !

Pire encore, le Ministre des transports, Gilles de Robien parle d'un étalement sur les cinquante prochaines années.

Dans l'immédiat il se limite à "un programme de modernisation des voies navigables de 800 millions d'euros avec un volet d'environ 435 millions d'euros relatif à la modernisation du réseau prioritaire pour le transport de marchandises." Il confirme " la modernisation des ouvrages de la Seine, de l'Oise et du bassin du Nord-Pas-de-Calais dans les délais prévus (2007)" et déclare que "si un canal doit être mis à grand gabarit, ce sera le canal Seine-Nord." Ce qui veut dire que la mise au niveau de cet axe, considéré comme prioritaire n'est pas prévue pour demain.

En raisonnant qu'en fonction de rentabilité ou d'équilibre d'exploitation des projets et en proposant de tel délais pour les réaliser, il est clair que nos hommes politiques n'ont pas totalement pris conscience des conséquences du réchauffement climatique et de l'état des réserves pétrolières mondiales.

Et pourtant ça chauffe !

Il est urgent, au contraire, de dégager les ressources nécessaires pour financer la modernisation des infrastructures de transport fluvial et d'engager leur mise en oeuvre. Dans ce cas encore, l'Union Européenne, directement concernée par ces mises à niveau, pourrait avoir un rôle moteur pour activer ce programme et apporter sa contribution à son financement.

Sources : Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement.
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Rapport d'information 366 (2001-2002) - Commission des Affaires Economiques du Sénat
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